L'assassin est mort, le film est terminé!

L’assassin est mort, le film est terminé !

L’équation à deux inconnus des Togolais risque de se transformer en une équation à un seul inconnu. Trop facile donc à résoudre. Pas besoin d’aller réveiller Boole et Pythagore. Comme on le dit chez nous – je traduis mot par mot -, l’eau destinée à faire la pâte risque de devenir une eau de bain.

Tout était, comme toujours, compliqué pour les élections présidentielles du 28 février 2010. Une opposition ridicule et sans volonté qui ne s’accepte pas, mésentente sur le mode de scrutin à adopter – un tour pour les RePTiles, deux tours pour les opposants -, listes électorales mal révisées, la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) qui ne joue pas son rôle, candidatures de certains candidats qui risquent d’être rejetées… autres charlatanismes et bazar que nous connaissons tous…

L’ambiance était, comme toujours, fiévreuse et chacun se grouillait à sa manière…

Comme toujours, les deux partis adverses à la tête du hit-parade, le parti au pouvoir, le Rassemblement du Peuple Togolais (RPT), véritable Goliath comptant sur sa force de titan et toute l’armée togolaise, et l’Union des Forces de Changement (UFC) conduit par Gilchrist Olympio comptant comme David sur une magie de sa frêle fronde, avaient commencé à s’échauffer, prêts à monter sur le ring… Le CAR, le PDP, l’Alliance … et les autres partis de moindre importance, malgré les grands airs que prennent leurs dirigeants, à l’instar d’un impuissant s’excitant devant une paire de fesses qu’il sait très bien ne pas être en mesure de consommer, jouant aux figurants pour présenter des scènes ridicules pour amuser la galerie, même si certains de leurs leaders ont choisi comme emblème – le comble du ridicule – un ballon de foot pour peut-être attirer cette horde  qui a toujours dansé autour du ballon rond.

Tout était prévu pour, une fois de plus, un beau roman à la Marie N’Diaye avec des rebondissements inattendus, comme par exemple un ministre de l’Intérieur qui se lève au milieu de la nuit, à quelques jours des élections présidentielles, pour dénoncer sur tous les toits les magouilles du parti au pouvoir dont il fait bel et bien partie, des vieillards si vieux que leur chair n’arrive plus à cacher les formes de leurs os que l’on impose comme candidat de l’opposition à la grande surprise de tout le peuple, un géronte à la barbichette de bouc qu’on croit trahi par le parti au pouvoir qui refoule à l’aéroport les militants de l’opposition venus l’accueillir en héros, des vieillards versant sur des légbas de l’huile, du vin et du lait en leur demandant d’aller voter pour ceux à qui on a refusé des cartes d’électeurs …

Que nenni ! Déception pour les amateurs des beaux romans ! Le suspens n’aura pas lieu cette année !

Comme on le disait durant nos jeunes âges – hélas -, dans les salles de vidéo, « l’assassin est mort, le film est terminé ! » « Assagan kou, filma kpa ! »

Le roman électoral togolais de 2010 est avorté dès le prologue, depuis le retrait de la course à la magistrature suprême de Gilchrist Olympio, candidat potentiel de l’UFC, homme-peuple, homme-parti, homme-changement, homme-opposition qui s’est toujours plu à se baptiser, ex cathedra, leader de l’opposition … suite à un… mal de dos qui l’aurait empêché de se présenter à Lomé pour les formalités exigées par la loi !

Dieu seul sait d’où lui était venu ce mal de dos si subit ! Serait-il  en train de faire des exercices de judo ? Eh bien, qui sait, le vieux métis de 74 ans, s’étant peut-être rendu compte qu’il ne pourra jamais battre son adversaire du RPT sur le plan politique, se serait reconverti en judoka pour engager un duel physique avec son rival au lendemain des élections présidentielles ! Rien n’est impossible dans notre sacré petit bled ! La comédie a toujours été au rendez-vous. On a déjà entendu parler de ces ministres qui s’étaient transformés en Mohamed Ali, s’empoignant pour une histoire de tickets à percevoir au grand marché de Lomé.

Gilchrist Olympio, l’homme-UFC, ne se présentera pas aux élections présidentielles de 2010, malgré tous ses efforts pour contraindre les organisateurs à repousser la date de l’échéance du dépôt des dossiers de candidature !

Les yeux en larmes, il se voit remplacer dans la course par le très virulent et bouillant secrétaire général de son parti Jean-Pierre Fabre beau gosse de la première classe, joli garçon sans produits ghanéens. La vieille tête d’économiste du métis a très rapidement fait des calculs. A 74 ans, on ne peut plus faire, avec certitude, des projets sur cinq ans ! Perdre la candidature de cette année signifie attendre jusqu’à 2015, 79 ans ! C’est plus que le yovovia ne peut en supporter ! Frustré, diminué, humilié, embêté, contrarié… bazardé par le sort – son pauvre sort qui n’a jamais semblé lui avoir souri -, il décide de détruire son propre royaume. « Je reste bien sûr le candidat investi par le Congrès de l’Union des Forces de Changement pour l’élection présidentielle au Togo », affirme-t-il dans un message publié sur le site de son parti le 16 Janvier 2010, semant une confusion totale dans l’esprit des Togolais, et de nouvelles frustrations dans son propre camp déjà divisé selon des sources très proches de ce parti.

Gilchrist Olympio, comme un fou qui commence à détruire des statues de sable qu’il a passé toute sa vie à construire, a décidé, dans son égoïsme ineffable, d’empoisonner son propre parti, juste parce qu’il n’est plus en mesure de se présenter aux élections présidentielles et qu’il sent sa vie politique à sa fin.

L’UFC, pour les Togolais, c’est Gilchrist. Et son retrait du processus électoral est déjà un coup fatal à son parti. Les Togolais ont toujours voté Gilchrist, le fils de Sylvanus Olympio, et non l’UFC. C’était d’ailleurs pour cette raison qu’en 2003, quand Bob Akitani avait été pour la première fois désigné pour représenter l’UFC, les affiches publicitaires le montraient aux côtés du vieux métis. En 2005, après la mort d’Eyadema, quand le même Bob Akitani fut proposé comme candidat unique de l’opposition, le peuple togolais s’était indigné, et on dut le calmer, promettant que Gil reprendrait le devant des choses dans les plus brefs délais après la victoire de l’opposition. Le grand opposant le sait très bien. Et, au lieu de soutenir de bon cœur son remplaçant qui auprès de l’électorat ne jouit pas de la même notoriété que lui, au lieu d’encourager les Togolais à accepter ce représentant de son parti – ce parti qui a d’ailleurs amorcé une véritable chute libre surtout auprès des jeunes qui ne croient plus en lui -, au lieu de réunir les autres opposants et faire fondre ensemble toutes les forces de l’opposition, Gilchrist ose encore parler de lui, de l’UFC…

On peut déjà prédire pour l’UFC des crises internes très fréquentes, une campagne électorale désastreuse – comme le vieux métis, plus pingre qu’un épi de maïs de saison sèche, ne sortira même pas un centime pour l’organisation des meetings et caravanes -, des militants déçus – donc des voix en moins - … des résultats… 

Tout pot aux roses finit par être découvert ici-bas. Le voile blanc qui recouvrait le visage du sacro-saint Gil est maintenant tombé. L’homme nous a montré ce qu’il est. Un égoïste de la pire espèce qui n’a jamais défendu les intérêts du Togo mais ses propres intérêts. Gilchrist a passé toutes ces décennies à donner au peuple togolais, ce peuple qui l’a tant aimé, des baisers de Judas ! De traître ! Gilchrist a fait tuer des enfants, des jeunes, des femmes… fait fuir le pays des milliers de Togolais qui vivent dans des conditions piteuses dans les pays limitrophes… pour finalement nous montrer qu’il n’est pas mieux que ces monstres du RPT qu’il passe tout son temps à critiquer. Il est d’ailleurs pire. Il est hypocrite ! Torquemada ! Réveille-toi de ta tombe et fais passer sur ton bûcher le traître !

Le Gil des Togolais est mort ! Et il veut se faire enterrer avec son parti ! Au grand malheur des Togolais désemparés et avilis !

Le RPT de Faure Gnassingbé, déjà très favorisé par le scrutin à un tour, à l’instar d’un combattant qui voit son adversaire agoniser devant lui, ne peut que se réjouir. Aucun autre parti politique de l’opposition ne peut lui faire peur. Les parieurs peuvent déjà commencer à faire leurs paris, sans risque, sur les résultats des élections du 28 Février. Etrange flash-back. Après tant d’années foutues en l’air, nous risquons de nous retrouver à l’époque du parti unique, le RPT toujours au pouvoir.

Que faire ? L’UFC appartient à Gil. Il veut la reprendre, aller dans sa tombe avec elle. Il préfère voir son parti s’exploser, si ce n’est pas lui-même, en chair et en os, qui doit le représenter aux élections. Nous connaissons tous ce proverbe de chez nous « On ne dit pas à un propriétaire qui veut retirer son mouton qu’on lui a mis une corde au cou ».

A nous maintenant de tout reprendre… A zéro ! Comme me le disait hier un ami étudiant, nous devons tout oublier, sans soupir, et nous remettre au travail… Pour demain… Pour le Togo !