Allez, vous n'a qu'à jouer ballon!

Allez, vous n’a qu’à jouer ballon !

Hop ! C’est parti pour un mois. La première Coupe du monde en terre africaine vient de débuter au pays de papa Mandela. Tous les grands médias africains et occidentaux, tous les yeux et oreilles sont tournés vers la Nation arc-en-ciel. On va, pendant trente jours, moins parler politique, à la grande joie des caïds africains qui peuvent facilement traiter en toute quiétude leur palu. Pas gagné, vieux ! Ne jubilez pas si tôt, y aura des cours de rattrapage, on reviendra, après le ballon rond, sur vos sempiternelles conneries. Parole d’emmerdeur sans loi.

Est-ce que je vous ai déjà dit que je suis, déjà, après seulement trois journées de compétition, déçu par la prestation des pays africains ? Oui, je suis plus-que-déçu. Parce que ces pays sur lesquels nous avons tant compté, à l’issue de leur première sortie, ont montré que ce n’est pas durant cette compétition emblématique, ce symbole de Coupe du monde, qui peut bien être un prologue au grand chapitre de la renaissance africaine, qu’ils vont donner au continent noir ce que l’on attend d’eux, arriver au moins en demi-finale.

L’Afrique du Sud, le pays organisateur, a été le premier mauvais élève, après son piteux match nul difficilement concédé devant une équipe mexicaine si facile à battre, compromettant sérieusement ses chances de qualification pour le second tour, comme ses prochains adversaires s’appellent France et Uruguay, deux pays qui ne sont pas des petits poucets en foot.

Le Nigeria, l’un des géants du football africain, sur qui reposent tous les espoirs de l’Afrique, s’est fait battre par l’Argentine par le score de 0-1. Miracle ! Les Africains sont très satisfaits de la prestation des Super Eagles ! La preuve, ici à Bamako, juste après le match, des caravanes ont sillonné les quartiers, fêtant l’exploit du Nigeria qui a réussi à se faire battre par l’Argentine par seulement un but d’écart, et surtout le gardien nigérian qui a humilié Lionel Messie, le Ballon d’Or 2009. Le comble, c’est quand sur une radio privée de Bamako, un journaliste sportif qualifie cette défaite de « bonne défaite » ! Et c’est justement là où les Africains peuvent rendre schizophrène. On célèbre cette culture de se contenter du peu, des fois même de rien, disant que tout ira la prochaine fois, une prochaine fois qui n’arrive jamais dans ce continent. On veut voir les équipes africaines en demi-finale, en finale, remporter la Coupe, en fêtant leurs « bonnes » défaites, comme si l’on peut se qualifier avec de « bonnes » défaites. Je me rappelle qu’en 2006, lors de la participation du Togo à la Coupe du monde en Allemagne, les Togolais avaient fêté la défaite du Togo contre la France (0-2), comme un exploit historique, glosant que c’était logique, obligatoire que le Togo perde devant la France car c’était sa première participation, alors que le Sénégal avait, quatre ans avant, atteint les quarts de finale, pour sa première expérience en Coupe du monde, en battant justement cette même France qui depuis 1998 jouissait du titre de championne du monde.

L’Algérie, qui a perdu (0-1) contre une petite équipe de la Slovénie, je n’en parle même pas pour ne pas provoquer des crises cardiaques à ceux qui ne lui ont jamais pardonné d’avoir éliminé l’Egypte, l’actuelle meilleure formation de foot du continent noir. Elle, tout le monde s’y attendait, du moins ceux qui savent voir les choses comme elles se présentent, elle n’a rien de potable à préparer en Afrique du Sud.

Mes oncles ghanéens, je ne peux pas passer sous silence leur victoire. La première de l’Afrique à cette Coupe du monde. Seulement, contrairement à la « bonne défaite » du Nigeria, la victoire du Ghana est une « mauvaise victoire », car l’équipe, avec tous les espoirs qui reposent sur ses épaules, n’a pas convaincu. Beaucoup d’erreurs dans la construction du jeu – ah, voyez que je joue au grand spécialiste de foot ! -. Le but a d’ailleurs été marqué sur penalty. Je vois mal cette équipe bien tenir devant de grandes formations comme le Brésil, l’Allemagne, l’Angleterre, l’Italie, l’Argentine, l’Espagne, le Portugal...

De toute façon, en attendant la sortie des Lions indomptables du Cameroun, et de nos frères du pays du décalé-coupé, les Eléphants je veux dire, malheureusement classés dans un groupe où évoluent des prédateurs comme le Brésil et le Portugal, je donne un carton rouge, une sévère sanction, à l’Afrique du Sud, le Nigeria, et surtout l’Algérie, et un carton jaune, un avertissement, aux Black Stars du pays de l’Oncle N’krumah.

Que toutes les six équipes africaines, sur qui reposent les espoirs de tous les Africains, se ressaisissent pour marquer de la meilleure manière possible cette Coupe du monde nôtre. Pour l’honneur de Nelson Mandela. Pour l’honneur de l’Afrique.

PS : Ah, carton rouge, comme on en parle, laissez-moi partager avec vous cette scène que j’ai suivie en 2003 chez moi là-bas à Tsévié, lors de la campagne électorale pour la présidentielle de 2003, la dernière élection volée par Eyadema. Un matin, un vieux monsieur d’une soixantaine d’années sort de sa maison située au bord de la grande route en courant, s’arrête devant une affiche de feu Gnassingbé Eyadema, sort un carton rouge de sa poche, le brandit devant la photo du père de la nation togolaise, et s’écrie : Eyadema ma gba non zia dzi o, ball close, terminé ! , « Eyadema ne restera plus sur le fauteuil, match terminé ! »